La mise en œuvre de la première étape dans un contexte de troubles monétaires européens et internationaux

La mise en œuvre de la première étape dans un contexte de troubles monétaires européens et internationaux1


Sous l’impact de la surévaluation du dollar américain, au printemps 1971, le climat monétaire international se détériore sensiblement2 et les effets sur les pays européens sont considérables3. «L’aggravation de la crise du dollar provoque un afflux massif de capitaux en Europe, de manière à déstabiliser les économies des pays à monnaie dite forte. L’afflux prenait des proportions telles que le 5 mai 1971, la République fédérale allemande suspendait la cotation du dollar USA sur la recommandation des instituts économiques. C’était pratiquement une décision de laisser flotter le cours du mark. Cette décision allait bien sûr à l’encontre du principe récemment affirmé de l’incompatibilité avec nos objectifs d’un système de changes flottants à l’intérieur du marché commun»4.


Les ministres des Finances des Six se réunissent en urgence les 8 et 9 mai. Devant le déferlement des capitaux indésirables qui mettent en péril la politique de stabilité, le ministre fédéral de l’Économie Karl Schiller propose deux solutions alternatives. La première envisage une réévaluation commune de toutes les monnaies de la Communauté. Pour arriver au résultat souhaité, on préconise soit la suppression du régime des changes fixes, soit le changement des parités entre les monnaies de la C.E., ainsi qu’un contrôle des changes. La deuxième solution serait le libre flottement du deutschemark dans le but de «laisser déterminer par le marché lui-même un rapport de parité adapté au marché»5. Une telle vision est jugée inacceptable pour le gouvernement français, très attaché au principe des taux fixes, ainsi qu’à l’instauration d’un contrôle des mouvements des capitaux6. Rome est inquiète pour la fragilité de la lire italienne, alors que les Belges sont déçus de constater que l’on écarte, avec le double marché des dollars, un instrument recommandé par la Commission de la CE. Compte tenu de la liaison étroite entre les devises des Pays-Bas et de l’Allemagne, l’acceptation du flottement du mark entraîne aussi le flottement du florin. Dans ce contexte, Pierre Werner et le baron Snoy et d’Oppuers, son homologue belge aux Finances, discutent sur l’opportunité de laisser flotter le franc belge. Ils partageant la même crainte: le flottement entre les monnaies Benelux pourrait miner le bon fonctionnement de cette union fondée sur une bonne base monétaire. Les Néerlandais, portés par le même souci, acceptent de maintenir au sein du Benelux le système de rétrécissement envisagé pour l’ensemble des Six, c’est-à-dire une marge de 1,5 %.


Les autorités de Londres ne se prononcent pas ouvertement sur les difficultés monétaires au sein de la Communauté. Cependant, un blocage prolongé des efforts d’intégration économique et monétaire concorde avec certains de leurs intérêts. La décision allemande de laisser flotter le mark ébranle une politique agricole qui ne convient pas aux Anglais et retarde une union monétaire à laquelle la City est assez opposée. Partisans d’une plus grande flexibilité des taux de change, les Anglais espèrent que l’isolement relatif de la France permettra l’adoption prochaine d’une telle solution. Quant aux États-Unis, «ils se réjouissent ouvertement de cette querelle européenne»7, d’autant plus que la division du bloc européen leur donne l’espoir de faire accepter par le FMI un système de taux de changes flexibles, consacrant ainsi le règne du dollar system.


Avec la décision du gouvernement allemand du 5 mai 1971 de suspendre la cotation du mark, le processus de l’Union économique et monétaire semble remis en cause. Or, le 9 février 1971, les ministres des Finances des Six avaient adopté le troisième programme de politique économique à moyen terme8, dont une des mesures pratiques visait la réduction, à partir de juin 1971, des marges de fluctuation entre les monnaies des États membres de 1,5 % à 1,2 %. Les dirigeants allemands nourrissent pourtant l’espoir de revenir à des taux fixes dans un délai rapproché, mais l’incertitude persistante autour du dollar faisait comprendre qu’il fallait compter avec des échéances plus longues9. Le 10 mai10, les gouvernements allemand et néerlandais décident de ne plus défendre le cours limite inférieur du dollar et de laisser flotter leurs monnaies. Mais le résultat ainsi obtenu a été contraire à l’objectif retenu et au lieu du processus de rapprochement prévu, on a une sorte d’éclatement11.


En pleine crise monétaire internationale, la réunion du Conseil des ministres Ecofin du 12 mai 1971 s’achève sans décision quant à la poursuite de l’Union économique et monétaire. Le même jour, Valéry Giscard d'Estaing, président en exercice du Conseil Ecofin, expose devant l’Assemblée nationale française les mesures envisagées par la France pour lutter contre la crise monétaire européenne en affirmant «[qu]’il faut rester fidèle à l’esprit et à la lettre des accords de Bretton Woods, c’est-à-dire revenir au système des parités fixes et poursuivre le processus d’union économique et monétaire»12. L’accroissement considérable des liquidités internationales et les mouvements incontrôlables des masses d’eurodollars dynamisés par les spéculations sont considérés comme principales causes de la crise monétaire internationale.


Au début de l’été, le déséquilibre de la balance des paiements des États-Unis est dramatique. Sur le marché libre, le prix de l’or atteint des sommets. Le 15 août 1971, le président Richard Nixon annonce la décision unilatérale du gouvernement américain de suspendre la convertibilité du dollar en or13. Une surtaxe temporaire de 10 % à l’importation est également instituée. La vulnérabilité à la spéculation d’un régime de changes fixes, d’une part, et la défaillance systématique d’autorités internationales, telle le FMI, en matière de coordination et d'inflexion des politiques nationales, d’autre part, présagent l’effondrement du système de Bretton Woods14. Au lendemain du 15 août 1971, la nécessité de réfléchir à un nouvel ordre monétaire international devient impérative. L’Europe est prise au dépourvu. «[…] Du fait des retards intervenus pour la mise sur pied d’un système communautaire, nous étions mal outillés techniquement et mal préparés intellectuellement pour réellement réagir en bon ordre»15.


C’est sous ces auspices que le Conseil des ministres des Finances des Six se réunit le 19 août 1971. Réitérant les propositions qu’il a déjà faites au mois de mai, Karl Schiller va encore plus loin et recommande le flottement concerté des monnaies européennes par rapport au dollar. Pour le ministre allemand, la défense contre des mouvements de capitaux spéculatifs exige une plus grande flexibilité de l’ensemble des monnaies européennes par rapport au dollar et exclut, «au moins à court terme, le retour à un système de parités fixes à l’intérieur de marges de fluctuation étroites»16. Cette vision est partagée par l’Italie et par le Benelux. D’ailleurs, ces trois partenaires élaborent un plan17 – présenté au ministre belge des Finances Snoy et d’Oppuers – qui consiste à laisser flotter ensemble les monnaies européennes vis-à-vis du dollar, tout en maintenant dans les relations internes le système des marges limitées18. Cette initiative ne recueille pas l’assentiment des autres États membres.

La France défend une thèse contraire et soutient un double marché des changes. Pour les opérations commerciales, des parités officielles seront maintenues, tandis que pour les transactions financières, un système de flottement concerté sera adopté. Il est également envisagé de préserver les parités fixes grâce à un contrôle des changes19. En conclusion à son intervention, Giscard d’Estaing ne manque pas de réaffirmer la conviction de la France qu’il serait «illusoire de concevoir […] la poursuite de la construction européenne sans des parités fixes entre les monnaies des pays membres de la Communauté»20.


Les partenaires communautaires sont donc profondément divisés au sujet de la politique monétaire à suivre. Comme ils ne parviennent pas à s’accorder sur une stratégie commune, ils agissent en ordre dispersé. «La Communauté manquait ce jour-là une grande occasion de souder les politiques monétaires et de faire front commun au désordre monétaire installé sur le plan mondial»21.


Dans le contexte d’un environnement monétaire international en pleine turbulence, entre août et décembre 1971, la convergence de vues entre les États membres de la Communauté se reconstruit peu à peu. Les Six, auxquels se joignent les Britanniques, exercent une forte pression sur le gouvernement américain pour prendre en considération une dévaluation du dollar avec la fixation d’un nouveau prix officiel de l’or. Le 10 septembre 1971, la Commission soumet au Conseil des ministres des C.E. sa position portant sur les mesures envisagées par l'Europe pour faire face à la suspension de la convertibilité du dollar en or22. Sur cette base, le 13 septembre, les Six arrivent à dégager une position commune par rapport au dollar, fondée sur l’exigence de la dévaluation de la monnaie américaine accompagnée de la suppression de la surtaxe à l’importation23.


Depuis le début de la crise monétaire, les divergences entre la France et l’Allemagne se manifestent davantage. Pour retrouver une ligne de conduite commune, elles entreprennent des consultations parallèles à plusieurs niveaux. L’exploration des archives diplomatiques allemandes et françaises montre qu’entre juin 1971 et fin novembre 1971 ont eu lieu cinq consultations diplomatiques, dans lesquelles la problématique de l’UEM occupe le centre de l’agenda. Durant la même période, les deux banques centrales ont des contacts et échanges réguliers pour une meilleure connaissance de leurs dispositions réciproques. Le terrain ainsi préparé, le président Pompidou et le chancelier Brandt se mettent d’accord (3-4 décembre 1971) sur une solution d’ensemble basée sur le retour à un système de parités fixes, toutefois assoupli par rapport à celui de Bretton Woods. Cet arrangement prévoit la dévaluation du dollar, le maintien de la parité du franc ainsi qu’une réévaluation du mark, tout en envisageant la réduction des marges de fluctuation entre les monnaies européennes24.


L’offensive diplomatique de la Communauté auprès des États-Unis se poursuit aussi dans le cadre du «Groupe des Dix»25. Au début des discussions (Londres, 14 septembre 1971), les Américains demandent une réévaluation des autres monnaies, une baisse de leurs barrières commerciales et une répartition plus équitable du budget de la défense internationale, tandis que les autres pays suggèrent une dévaluation unilatérale du dollar américain par une hausse du prix de l'or. Lors de la deuxième rencontre (Washington, 26 septembre 1971), le désaccord persiste. Les États-Unis semblent prêts à laisser continuer la crise puisque la spéculation entraîne une réévaluation des autres monnaies, les faisant se rapprocher ainsi de leur principal objectif. La troisième réunion (Rome, 30 novembre-1er décembre 1971) marque les prémices d’un compromis26. Dans ses mémoires, Pierre Werner évoque les propos du secrétaire au Trésor des États-Unis, Connally, qui affirmait l’hypothèse d’un réalignement des monnaies incluant une dévaluation éventuelle de 10 % du dollar américain.


Les 13 et 14 décembre 1971, le président Georges Pompidou, porteur de la position commune des partenaires communautaires, rencontre le président Richard Nixon. Ils s’accordent sur un prompt réalignement des monnaies à travers une dévaluation du dollar américain et une réévaluation des autres monnaies. Sur cette base, Européens, Américains, Canadiens et Japonais, réunis les 17 et 18 décembre 1971 en conclave monétaire au Smithsonian Institute, parviennent aux accords de Washington (ou encore Smithsonian Agreement)27. Les signataires s’entendent pour établir de nouvelles parités entre leurs monnaies et pour porter les marges de fluctuation à 2,25 % de part et d’autre des taux officiels autorisés28. C’est le «tunnel monétaire» américain que «le serpent monétaire européen»29 empruntera bientôt. Compte tenu du fait que le dollar américain (inconvertible en or) sert de devise de référence pour les monnaies européennes, la Communauté se retrouve ainsi liée à une monnaie et à une économie sur lesquelles elle n’a aucun recours et aucun pouvoir de contrôle.


Dans l'ensemble, les accords de Washington proposent des solutions temporaires et immédiates à la crise monétaire, mais ne résolvent aucunement les problèmes réels et structurels qui minent les bases du système monétaire international. Le dollar, qui subit sa première dévaluation depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, demeure inconvertible en or. L'asymétrie dans l'ajustement, le choix politique d'une balance interne au détriment de l'équilibre externe, les problèmes des liquidités et le manque de confiance chez les agents économiques internationaux ont été très peu touchés à Washington. Dès lors, l’abandon du système de Bretton Woods, ainsi que le besoin de construire un nouveau système monétaire international sont imminents. L'accalmie qui a suivi sur les marchés des changes et une certaine harmonisation de la position des Six quant à la réforme du système monétaire international permettent la relance de la coopération monétaire au sein de la Communauté. Le 21 mars 1972, le Conseil adopte une résolution relative à la mise en place de la première étape du plan Werner30. Les banques centrales, invitées à réduire progressivement les marges de fluctuation entre les monnaies des États membres, concluent le 10 avril l’accord de Bâle qui met en place un système de resserrement des marges de fluctuation entre les monnaies communautaires, avec ses mécanismes d'intervention et de soutien à court terme. C’est le «serpent monétaire», la première tentative européenne de stabilisation des changes. Participent à ce mécanisme les monnaies des six États membres fondateurs de la Communauté et les pays qui allaient rejoindre la Communauté au 1er janvier 1973 (le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande). Le «serpent» sert à limiter les fluctuations de taux de change en empêchant que l'écart instantané entre deux monnaies des C.E. n’excède la limite de 2,25 %. Ce mécanisme est assorti d’un «tunnel» qui fixe les limites des fluctuations par rapport au dollar américain – très instable, mais monnaie de référence internationale. Cette limite peut s’élever à 4,50 % (à savoir le double de la limite de fluctuation entre les monnaies européennes). Au-delà de ces seuils (2,25 % et respectivement 4,50%), l’intervention de la banque centrale du pays concerné s’impose. Le régime spécial du Benelux est maintenu (étant appelé «le ver dans le serpent»)31. Ultérieurement, pour étayer le fonctionnement du «serpent monétaire», les banques centrales créent le mécanisme de financement à très court terme, qui deviendra «un véritable dispositif de crédit mutuel entre les banques centrales»32.

1 Sauf mention contraire, tous les documents cités dans la présente étude ont comme source www.cvce.eu.

2 En 1968 et en 1969, les immenses déficits de la balance des paiements américaine sont financés par un afflux sans précédent de capitaux à court terme. Par l’intermédiaire du marché des eurodollars et en raison de la politique monétaire très restrictive pratiquée aux États-Unis, les créances en dollars mises en circulation par ces déficits avaient été conservées par des détenteurs privés et, de ce fait, non présentées à la conversion sur les marchés des changes. Le double marché de l’or (créé en mars 1968, qui maintenait une convertibilité de droit du dollar) n’avait, de ce fait, pas été mis à l’épreuve. Les banques centrales n’avaient pas de raisons pour demander aux États-Unis de convertir des dollars en or. La situation change à partir de mai 1970, au moment où les autorités monétaires américaines relâchent leur pression sur les taux d’intérêt. Les banques américaines se désendettent alors massivement sur le marché des eurodollars où les taux baissent profondément et deviennent inférieurs à ceux qui sont pratiqués en Europe. Cf. BERGER, Guy. Le conflit entre l'Europe et les États-Unis. In Revue française de science politique, 22e année, n° 2, 1972. pp. 348-356, spéc. pp. 352-353. À l’inverse, l’Allemagne fait face à une forte croissance, ce qui oblige la Bundesbank à appliquer des taux d’intérêt à court terme élevés. S’ensuit un afflux de capitaux à court terme contribuant à la hausse du taux de change du mark allemand par rapport au dollar américain. Pour garantir que le mark allemand demeure dans les marges de fluctuations prévues par les accords de Bretton Woods, la Bundesbank achète 1 milliard de dollars américains dans les 40 dernières minutes d’ouverture des marchés le 5 mai 1971! Cf. HETZEL, L. Robert. German Monetary History in the Second Half of the Twentieth Century: From the Deutsche Mark to the Euro. Federal Reserve Bank of Richmond, Economic Quarterly, Vol. 88/2, printemps 2002, pp. 29-64, spéc. p. 40.

3 Voir la section 1.3 intitulée «Environnement économique et monétaire à la fin des années 1960».

4 La spéculation à l’encontre du dollar américain et au profit du mark allemand détermine le gouvernement fédéral à fermer le marché des changes le 5 mai 1971. Les Pays-Bas et la Belgique font de même. Cf. WERNER, Pierre. Itinéraires luxembourgeois et européens. Évolutions et souvenirs: 1945-1985. Luxembourg: Éditions Saint-Paul, 1992, 2 tomes, tome II, p. 138.

5 Betr.: Gegenwärtige wirtschaftspolitische Lage. 06.05.1971. Note interne du ministère de l’Économie (Troll), W II 3, Az. 75-11-02-01, papiers Helmut Schmidt. Bonn: Archiv der sozialen Demokratie der Friedrich-Ebert-Stiftung, vol. 8635.

6 Dans une note diplomatique en date du 27 juillet 1971, rédigée par la direction de coopération du ministère des Affaires étrangères et intitulée La nécessité d’une initiative européenne, il est mentionné que «le gouvernement allemand cherche à tirer parti de la dernière crise monétaire, afin de maîtriser son inflation (importée et interne) selon une thérapeutique libérale. En laissant flotter le DM vers le haut, sans indication, ni durée, Bonn fatigue la spéculation et freine la croissance. […] Les économistes allemands ont toujours soutenu que l’Union économique et monétaire ne pouvait être édifiée que sur des parités reflétant la réalité des forces économiques en présence. […] Bonn redoute d’avoir à soutenir en permanence les monnaies défaillantes de certains de ses partenaires». Ministère des Affaires étrangères et européennes de la République française, fonds CE, direction des Affaires économiques et financières, service de coopération économique, série PM, vol. 973 UEM, dossier PM 19.8. La Courneuve: Archives diplomatiques.

7 Ibid., référence est faite à une lettre ouverte adressée par un groupe d’économistes américains à l’Institut de prévision d’Allemagne pour «le féliciter d’avoir recommandé le flottement du DM».

8 Troisième programme de politique économique à moyen terme. In Journal officiel des Communautés européennes, Bruxelles, 01.03.1971, n° L 49/5. (Document consulté le 10 octobre 2012.)

9 Cf. la lettre de Brandt à Pompidou, du 09.05.1971. Archives Willy Brandt, fonds Bundeskanzler, vol. 51, citées par WILKENS, Andreas. Willy Brandt und die europäische Einigung. In Die Bundesrepublik Deutschland und die europäische Einigung 1949-2000. Politische Akteure, gesellschaftliche Kräfte, internationale Erfahrungen. KÖNIG, Mareike; SCHULZ, Matthias (Hg.). Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 2004.

10 Dans ses mémoires, Pierre Werner retient cette date, mais d’autres sources mentionnent le 9 mai comme moment de la décision prise par l’Allemagne, les Pays-Bas et également par la Belgique de laisser flotter librement leurs monnaies. Cf. KLEPS, Karlheinz. On the way to the Next Monetary Crisis, Intereconomics. N° 4, 1972, p. 107.

11 Voir ALBERT, Michel. La désunion monétaire européenne. In Revue française de science politique, 22e année, n°2, 1972. pp. 382-390.

12 Déclaration de Valéry Giscard d’Estaing à l’Assemblée nationale, 12 mai 1971. In La politique étrangère de la France. Textes et documents, dir. de publ. ministère des Affaires étrangères. Premier semestre, octobre 1971. Paris: La Documentation Française, série 1er janvier 1971 - 31 décembre 1972, pp. 162-167.

13 En fait, il s’agit de la suspension de la convertibilité du dollar en or ou en autres instruments de réserve définis en or tel que le droit de tirage spécial (DTS/SDR) créé en 1969 par le Fonds monétaire international pour répondre aux besoins de liquidités du système.

14 Voir la section 1.1 intitulée «Contexte monétaire international de l’après-guerre».

15 WERNER, Pierre. Itinéraires. T. II, p. 138. Voir aussi l’interview donnée par Raymond Barre, vice-président de la Commission européenne en charge des affaires économiques et financières, au mensuel économique suisse Vision, dans laquelle il décrit ses propositions pour mettre fin aux troubles monétaires en Europe. In Vision. Le magazine économique européen. Dir. de publ. COVILLE, Christine; GORDEVITCH, Igor; NORALL, Frank; COLSON, Jean; Réd. chef HEYMANN, Philippe. Juin 1971, n° 7. Genève: SEPEG. (Document consulté le 10 octobre 2012.)

16 Compte rendu de la séance restreinte du Conseil des ministres européen. Bruxelles: 19 août 1971, R/1869 d/71. Archives historiques de la Bundesbank, B 330, vol. 10851.

17 Proposition des délégations de Benelux. Avant-projet d’arrangement monétaire entre les membres de la Communauté économique européenne, août 1971. Voir Système de régime de change en vigueur dans les pays du Benelux depuis le 23 août 1971. Communication de la représentation permanente de la Belgique à la Commission. Bruxelles: Communauté européenne, secrétariat du comité monétaire, réf. OR II/506/71-F, 31 août 1971. In Archives familiales Pierre Werner, réf. PW 042 intitulée Union économique et monétaire. Mise en œuvre: 1971-1972.

18 Devant le refus des autres partenaires par rapport à cette proposition, les pays du Benelux décident de laisser flotter leurs monnaies par rapport au dollar, tout en maintenant le rapport de l’une à l’autre dans les marges de fluctuation de ±1,5 %. Ceci représente en fait un mini-serpent monétaire sui generis. Notons également que les francs belge et luxembourgeois étaient liés par une parité 1/1 établie dans le cadre de l’association monétaire entre les deux pays. La Banque nationale de Belgique assumait la fonction de banque centrale pour les deux pays. Les billets de banque belges avaient également cours au Luxembourg, en plus d’un volume limité de billets de banque nationaux que les autorités luxembourgeoises pouvaient émettre.

19 Voir POMPIDOU, Georges. Entretiens et discours. Volume II: 1968-1974. Paris: Editions Plon, 1975, 321 p.

Source: Communiqué de Georges Pompidou sur la situation monétaire internationale (Paris, 18 août 1971). (Document consulté le 10 octobre 2012.)

20 Compte rendu de la séance restreinte du Conseil des ministres européen. Bruxelles: 19 août 1971, R/1869 d/71. Archives historiques de la Bundesbank, B 330, vol. 10851.

21 WERNER, Pierre, Itinéraires. T. II, p. 141.

22 Communication de la Commission au Conseil sur les problèmes posés par la situation monétaire actuelle (10 septembre 1971). In Bulletin des Communautés européennes. Septembre-octobre 1971, n° 9/10. Luxembourg: Office des publications officielles des Communautés européennes. (Document consulté le 10 octobre 2012.)

23 Voir Commentaires de M. Werner après le Conseil des ministres des Finances à Bruxelles. Télégramme diplomatique à l’arrivée, réf. n° 87, Luxembourg, 14 septembre 1971. Ministère des Affaires étrangères et européennes de la République française, fonds CE, direction des Affaires économiques et financières, service de coopération économique, série PM, vol. 979 Consultations UEM, dossier PM 19.11. La Courneuve: Archives diplomatiques. Pour une présentation plus large, voir la conférence de presse de Georges Pompidou du 23 septembre 1971. In POMPIDOU, Georges, Entretiens et discours. Paris: Plon, 1968-1974, tome II, 1975, pp. 38-47.

24 Lors des pourparlers franco-allemands, le président Pompidou a exigé un taux de réévaluation fort (de 6 %) pour le mark. De son côté, Brandt s’inquiétait des conséquences d’un renchérissement excessif du mark sur l’industrie exportatrice. Cf. BERNARD, Jean-René. Georges Pompidou et l’effondrement du système de Bretton Woods. In La France et les institutions de Bretton Woods 1944-1994. Colloque tenu à Bercy les 30 juin et 1er juillet 1994. Paris: Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1998, pp. 121-125.

25 Le Groupe des Dix formé en 1962 comprend les représentants des gouvernements de huit États membres du FMI (Belgique, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni) et des banques centrales de deux autres, l’Allemagne et la Suède. La Suisse (qui n’était pas encore membre du FMI) s’y joint en 1964, mais l’appellation G-10 ne change pas. Après la crise déclenchée le 15 août 1971, le Groupe se réunit trois fois: à Londres le 14 septembre, à Washington le 26 septembre (en marge de l’assemblée annuelle du FMI) et à Rome les 30 novembre et 1er décembre 1971.

26 Voir NAPPI, Carmine. La réforme du système monétaire international: une chronologie et interprétation des événements. L'Actualité économique, vol. 54, n° 2, 1978, pp. 263-286. Voir WERNER, Pierre. Itinéraires. T. II, p. 140.

27 Le 18 décembre 1971, le Groupe des Dix expose les principales mesures monétaires approuvées à Washington par les ministres et par les gouverneurs des banques centrales des dix pays participant aux accords généraux d'emprunts. Communiqué du «Groupe des Dix» (Washington, 18 décembre 1971). In Bulletin des Communautés européennes, janvier 1972, n° 1. Luxembourg. (Document consulté le 10 octobre 2012.)

28 L’accord complet vise les points suivants: élimination de la surtaxe de 10 % sur un fort pourcentage des importations américaines; hausse du prix de l'or de US $ 35 à US $ 38 l'once, équivalant à une dévaluation du dollar américain de 8,57 %; le dollar américain demeurait inconvertible en or. Le réalignement des autres monnaies, incluant l'effet de la dévaluation de 8,57 % du dollar américain, donnait par rapport à ce dernier l'appréciation suivante: la couronne suédoise, 7,49 %; le deutschemark, 13,58 %; le florin hollandais, 11,57 %; le franc belge, 11,57 %; le franc français, 8,57 %; la lire italienne, 7,48 %; la livre sterling, 8,57 % et le yen japonais, 16,88 %. Le FMI est tenu à rétablir un nouveau régime par lequel les pays membres pouvaient faire fluctuer leur taux de change dans une marge de 2,25 % de chaque côté du taux central résultant du nouveau réalignement. Les Américains étaient très satisfaits des accords Smithsonian puisqu'ils obtenaient un réalignement important des devises de leurs principaux concurrents en retour d'une faible baisse de la valeur du dollar par une hausse du prix de l'or. Signalons que cette «concession» était en effet fort modeste puisque même si théoriquement les banques centrales pouvaient faire changer US $ 38 pour une once d'or, cela était impossible en pratique puisque le dollar américain demeurait inconvertible en or.

29 Cf. Communiqué du «Groupe des Dix». Washington: 18 décembre 1971. In Bulletin des Communautés européennes, janvier 1972, n° 1, Luxembourg.

30 Résolution du Conseil relative à l'application de la résolution du 22 mars 1971 concernant la réalisation par étapes de l'Union économique et monétaire dans la Communauté (21 mars 1972). Luxembourg: Journal officiel des Communautés européennes, n° C. 38, 18.04.1972, pp. 43-46. Parallèlement, le Conseil ECOFIN adopta plusieurs actes législatifs dont l’objectif était de lutter contre les pressions inflationnistes au sein de la Communauté et contre les crises croissantes du marché des changes. (Document consulté le 10 octobre 2012.)

31 Au Conseil du 6 mars 1972, un accord sur le rétrécissement des marges est obtenu. Dès le 23 août 1971, les pays du Benelux avaient mis en place un système de marges plus étroites (1,5 % au lieu de 2,25 % pour le futur accord communautaire). Ce mécanisme a fonctionné quelques temps simultanément avec le «serpent», mais, en l’absence d’une coordination étroite des politiques monétaires entre la Belgique (représentant aussi le Luxembourg) et les Pays-Bas, il ne tardera pas à disparaître.

32 Voir SCHELLER, Hanspeter. Le Comité des gouverneurs des banques centrales de la Communauté économique européenne et l’unification monétaire européenne. In Histoire, économie & société, 2011, vol. 30, n° 4, pp. 79-100.

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