Les propositions


Le Plan Werner, rendu public le 8 octobre 1970, est un subtil compromis entre les thèses économistes et monétaristes qui s'opposent au sein du comité. La voie médiane est difficile à trouver entre les positions allemandes qui veulent réaliser une convergence économique comme préparation à l'union monétaire, et celles qui souhaitent, comme c'est le cas pour la France, développer d'abord la coopération monétaire et faciliter ensuite le rapprochement économique.


Le projet est néanmoins ambitieux en ce qu'il propose la création irréversible et par étapes d'une union économique et monétaire européenne à laquelle il confère une signification politique fondamentale. Il adopte en effet comme postulat que le Plan Barre sera intégralement mis en œuvre au moment du passage, le 1er janvier 1971, à la première étape de l'union économique et monétaire.


Le Plan Werner propose de réaliser la libre-circulation des capitaux et de limiter les fluctuations entre les monnaies européennes à l'aide d'un fonds de réserve. L'Union économique et monétaire (UEM) s'achèverait par le gel des parités monétaires puis par l'introduction d'une monnaie unique.


Le rapport insiste sur la nécessité de mener des consultations avec les milieux économiques et sociaux avant la définition des orientations de la politique économique communautaire. Il précise d'ailleurs que l'UEM suppose une croissance économique satisfaisante, un haut degré d'emploi, la suppression des disparités régionales et sociales, la mobilité des facteurs de production, l'abolition des frontières fiscales entre les Six et la libéralisation des échanges mondiaux.


Le Plan Werner préconise la poursuite des politiques communes des Six, l'introduction d'une plus grande flexibilité et d'une coordination des politiques budgétaires ainsi qu'une harmonisation des taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et sur les accises. Il confie au Comité des gouverneurs des banques centrales le soin de définir les orientations relatives aux taux d'intérêt, aux liquidités bancaires et à l'octroi de crédits aux secteurs public et privé. Il définit enfin des procédures en ce qui concerne l'établissement des taux de changes réciproques et l'octroi de crédits intracommunautaires.


Le groupe de travail ne limite toutefois pas ses réflexions aux questions strictement monétaires. Il fait également des propositions précises en ce qui concerne les institutions communautaires. Il pose en effet que l'unification économique et monétaire devra s'accompagner du transfert d'attributions des autorités nationales aux organes communautaires. Le Plan Werner prévoit notamment que le Conseil tiendra au moins trois réunions annuelles spécialement consacrées à l'examen de la conjoncture économique dans la Communauté. La Commission aura, pour sa part, la charge de proposer au Conseil les dispositions nécessaires à la mise en route de la première étape. Il précise également que l'unification monétaire des Six requiert l'extension des attributions et l'adaptation du mode d'élection des membres du Parlement européen. Le rapport préconise enfin l'institution d'un Agent chargé de missions d'enregistrement statistique, d'information et d'avis en ce qui concerne les opérations de change effectuées par les États membres. Il n'exclut pas la mise en œuvre, au plus tard au cours de la deuxième étape, d'une Fonds européen de coopération monétaire (FECOM). Le Plan Werner propose enfin de créer deux nouvelles instances de direction, l'une politique, l'autre monétaire :


– un centre commun de décision économique indépendant des gouvernements mais responsable devant le Parlement européen


– un système communautaire des banques centrales inspiré du Federal Reserve System des États-Unis


Le Plan Werner met en avant la nécessité d'associer les processus de l'unification monétaire, de l'intégration économique et du rapprochement politique des États membres de la CEE.

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