La procédure électorale

La procédure électorale

L'article 138 CEE, 108 Euratom et 21 CECA prévoient que l'élection au suffrage universel direct des membres de l'Assemblée se réalise conformément à une procédure électorale uniforme dans tous les États membres. L'acte du 20 septembre 1976 se garde cependant d'uniformiser de suite la procédure électorale. Seuls quelques principes sont définis, tels que la répartition des sièges, les dates d'élection, les principes du scrutin ou la nature du mandat. L'article 7 de l'acte appelle à ce que l'Assemblée élabore un projet de procédure électorale uniforme qui sera soumis au Conseil. Dans cette attente, la procédure électorale est régie, dans chaque État membre, par les dispositions nationales. Relèvent tout spécifiquement du droit national le mode de scrutin, la circonscription, l'accès au vote, les conditions d'éligibilité, les incompatibilités complémentaires de celles déjà prévues dans l'acte de 1976.

Les premières élections européennes de 1979 se déroulent sur la base des procédures électorales nationales. Le débat sur l'adoption d'une procédure proprement communautaire est renvoyé aux parlementaires européens, à charge pour eux de la définir pour qu'elle puisse être mise en place pour les élections de 1984. Une première résolution est adoptée par le Parlement européen le 10 mars 19821 (rapport Seitlinger). Il est proposé l'adoption d'un mode de scrutin de type proportionnel avec répartition des sièges selon la méthode d'Hondt; et la définition, dans chaque État membre, de circonscriptions plurinominales qui auraient compté entre 3 et 15 députés. Le Conseil n'y donne pas suite.

En 1985, le rapport Bocklet adopté par la commission politique du Parlement préconise la définition d'objectifs communs et non d'une procédure totalement uniforme. L'opposition de la commission juridique, ainsi qu'entre les groupes politiques sur ce sujet, conduit à ce que le rapport ne soit pas présenté au vote de l'assemblée plénière mais qu'un groupe de travail intergroupe se charge de rapprocher les positions. Aucun projet ne peut être présenté au Conseil pour les élections de 1989. Après ces élections, les réflexions reprennent sous la responsabilité de Karel de Gucht, rapporteur au sein de la commission institutionnelle. Elles aboutissent en mars 1993, avec l'adoption d'une nouvelle résolution. Celle-ci préconise que la procédure électorale uniforme repose sur un mode de scrutin de type proportionnel tenant compte des suffrages exprimés sur l'ensemble du territoire des États membres. Le vote préférentiel est permis ainsi que la possibilité de fixer un seuil minimum compris entre 3 et 5 % des suffrages exprimés. Un régime particulier est prévu pour le Royaume-Uni où le scrutin proportionnel est inconnu2. Le rapport est adopté trop tard dans la législature pour permettre son adoption par le Conseil et sa mise en œuvre pour les élections de 1994. Le Conseil est cependant saisi de ce dossier après 1994 et s'engage à l'examiner.

De nombreux appels sont lancés en sa faveur, dont celui du président de la République française, Jacques Chirac, en 1996. La question de la procédure électorale uniforme est inscrite parmi les sujets de réflexion de la conférence intergouvernementale de 1996. Le gouvernement allemand dépose, en octobre 1996, une proposition qui reprend pour l'essentiel les principes de la résolution du Parlement de mars 1993. Afin de lever les oppositions du Conseil à une uniformisation trop marquée – le Conseil se prononce à l'unanimité sur la proposition du Parlement –, le traité d'Amsterdam précise que l'élection au suffrage universel peut se dérouler selon une procédure électorale uniforme «ou conformément à des principes communs à tous les États membres». L’adoption d’une procédure électorale au niveau européen est ainsi simplifiée, quitte à ce qu’elle ne soit pas uniforme.

Le 15 juillet 1998, le Parlement adopte un nouveau projet qui préconise le scrutin proportionnel, l'introduction d'un système de circonscriptions territoriales facultatif pour les États membres de moins de 20 millions d'habitants, un seuil minimal inférieur ou égal à 5 % des suffrages exprimés pour l'attribution des sièges3. C'est sur cette base que le Conseil adopte sa décision (2002/772/CE, Euratom) du 25 juin 2002 et du 23 septembre 20024 qui introduit dans l'acte de 1976 les principes d'une procédure électorale uniforme. La décision laisse la possibilité aux États membres d’appliquer les dispositions nationales pour les aspects non régis par l’acte, sans porter globalement atteinte au caractère proportionnel du mode de scrutin. Le Conseil recommande l’adoption des dispositions de la décision 2002/772/CE, Euratom par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. Cette décision prend effet le 1er avril 2004. Les négociations de la décision au Conseil sont facilitées par le fait que le Royaume-Uni ait modifié sa loi électorale en 1998 et qu'il ait introduit le scrutin proportionnel pour les élections européennes de 1999.

Les principes communs arrêtés par la décision (2002/772/CE, Euratom) peuvent se résumer comme suit:

  • scrutin, de liste ou de vote unique transférable, de type proportionnel; les États membres peuvent autoriser le scrutin de liste préférentiel selon les modalités qu'ils arrêtent,

  • découpage territorial pour l'organisation des élections qui relèvent de la compétence des États membres. Ceux-ci peuvent opter pour une ou plusieurs circonscriptions ou prévoir d'autres subdivisions électorales sous réserve qu'il ne soit pas porté globalement atteinte au caractère proportionnel du mode de scrutin,

  • possibilité de fixer au niveau national un seuil minimal pour l’attribution de sièges qui ne dépasse pas 5 % des suffrages exprimés.

Depuis 2004, tous les États membres appliquent un système de représentation proportionnelle, même si des différences existent en ce qui concerne le nombre de circonscriptions, l'existence ou non d'un seuil minimal pour la répartition des sièges ou encore la possibilité d'un vote préférentiel.



1Résolution du Parlement européen relative à un projet de procédure électorale uniforme pour l'élection des membres du Parlement européen du 10 mars 1982. JOCE C 87 du 5 avril 1982, p. 64.

2Résolution du Parlement européen sur le projet de procédure électorale uniforme pour l'élection des membres du Parlement européen du 10 mars 1993, A3-0381/92. JOCE C 115 du 26 avril 1993, p. 121.

3Résolution du Parlement européen sur l'élaboration d'un projet de procédure électorale uniforme comprenant des principes communs pour l'élection des députés au Parlement européen du 15 juillet 1998. JOCE C 292 du 21 septembre 1998, p. 66.

4JOCE L 283 du 21 octobre 2002, p. 1.

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