La représentation internationale

La représentation internationale

La situation différenciée au sein de l'Union économique et monétaire (UEM) entre les États membres dont la monnaie est l'euro et les autres États membres, ainsi que l'éclatement de la fonction de représentation externe entre plusieurs institutions et organes communautaires constituent un facteur de complication pour décider la manière dont l'Union européenne (UE) est représentée à l'extérieur dans le domaine de l'UEM. De façon générale, le traité confie à la Commission la fonction d'assurer la représentation extérieure de l'UE1. S'agissant spécifiquement de la zone euro, il appartient au Conseil, agissant sur proposition de la Commission, d'adopter les mesures appropriées pour assurer une représentation unifiée de la zone euro au sein des institutions et conférences financières internationales. Le Conseil statue après consultation de la Banque centrale européenne (BCE)2. Sans préjudice de la responsabilité générale du Conseil, la BCE décide la manière dont le SEBC est représenté dans le domaine de coopération internationale concernant les missions confiées au SEBC.

Les débats sur la représentation externe de l'UE

Les débats concernant la représentation externe de l'U sont conduits au cours du deuxième semestre 1998 sur la base du cadre général défini par le Conseil européen de Luxembourg des 12 et 13 décembre 1997: «Le Conseil et la Banque Centrale Européenne rempliront leurs tâches dans la représentation de la Communauté au niveau international de manière efficace et dans le respect de la répartition des compétences prévue au traité. La Commission sera associée à la représentation externe dans la mesure nécessaire pour lui permettre d'exercer le rôle que lui assignent les dispositions du traité.»3 Les grands États membres déjà représentés dans les principales instances financières internationales (par exemple le G7 en ce qui concerne la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni) ne souhaitent pas y renoncer au profit d'une représentation unifiée assurée par la présidence en exercice du Conseil (ou du président du groupe des pays de la zone euro) et/ou par la BCE. La BCE défend une représentation propre au sein du conseil d'administration du Fonds monétaire international, compte tenu de ses pouvoirs monétaires. Les petits États membres craignent une captation de la représentation externe de l'UEM par les grands États membres et réclament d'être aussi représentés au niveau international. La Commission préconise une représentation de l'UE par le Conseil à laquelle elle-même et la BCE seraient associées4. Quant aux partenaires étrangers des États membres, ils dénoncent la sur-représentation dont ceux-ci bénéficient déjà au sein des institutions financières internationales. En outre, modifier les termes de la représentation des États membres au sein de ces institutions exige d'en réviser les statuts, une opération longue et difficile écartée au profit de l'adoption d'arrangements pratiques. De fait, la proposition de décision du Conseil présentée par la Commission en novembre 1998 est écartée au profit d'une approche pragmatique approuvée par le Conseil européen de Vienne des 11 et 12 décembre 1998.

À la suite de l'entrée de la Communauté dans la troisième phase de l'UEM, les arrangements pratiques sont pris entre les États membres de la zone euro, les institutions communautaires et les institutions et enceintes financières internationales. En fait, en soumettant au seul Conseil la question de la représentation de l’UEM sur la scène internationale, les auteurs du traité de Maastricht ont implicitement subordonné tout progrès à la seule volonté politique des États membres, avec à l’esprit, l’idée que la création de la monnaie unique, la solidarité accrue qui en découle entre ses membres, créerait nécessairement une incitation à la convergence des intérêts et donc à des avancées substantielles dans ce domaine5. Depuis lors, à l'exception de la Banque des règlements internationaux, aucune des institutions financières internationales n'a révisé ses statuts pour faire une place plus grande à la représentation de l'UE et des États membres.

La Convention sur l’avenir de l’Europe de 2002-2003 est l’occasion de relancer le débat concernant la représentation externe de l’UEM. Dans leur proposition conjointe sur la gouvernance économique, la France et l’Allemagne défendront l’idée d’une représentation européenne unique au sein des institutions financières internationales6. L'instauration d'une présidence stable de l'Eurogroupe à partir de janvier 2005 contribue à améliorer en pratique la représentation de la zone euro et de ses intérêts au niveau international7. Le président de l'Eurogroupe a notamment pour mission de «représenter l'Eurogroupe dans les réunions avec les pays tiers et dans les forums internationaux.»8 Dans sa déclaration annuelle 2007 sur la zone euro, la Commission plaide le renforcement de la représentation extérieure de la zone euro et l'adoption d’une «stratégie internationale» par la zone euro caractérisée notamment par l'obtention d'un siège unique dans les institutions et les forums financiers internationaux9. Le développement de la coopération internationale pour gérer la crise financière de 2007-2008, ainsi que les réformes de la gouvernance économique de la zone euro depuis 2010, renouvellent l'exigence d'une meilleure représentation extérieure de la zone euro. Les propositions faites par la Commission et le groupe de haut niveau présidé par Herman Van Rompuy vont dans ce sens10. Au 1er novembre 2013, aucune décision du Conseil n'a été prise à ce jour sur la base de l'article 138, paragraphe 2, du traité FUE.

Concernant les enceintes pour lesquelles aucun arrangement n’est adopté au niveau communautaire, la BCE, sur la base de ses pouvoirs de représentation propre, obtient d’y être représentée. Il s’agit des réunions du G10, du G20, de l’OCDE et du Forum de stabilité financière.11

Les arrangements pratiques

La représentation de l'Union européenne et celle de la zone euro reposent sur des arrangements pragmatiques à géométrie variable. Selon les institutions et les enceintes financières internationales d'une part, les sujets traités d'autre part, les intérêts et positions de l'UE/zone euro sont représentés par un État membre et/ou par une institution ou un organe communautaire. La Commission, ainsi que la BCE, disposent toutes deux d'un bureau de représentation à Washington.

Au FMI, la représentation des positions de l'UE varie selon les réunions considérées. Une constante cependant: elle est éclatée entre plusieurs autorités. Les réunions bi-annuelles du comité monétaire et financier international donnent lieu à la fois à un discours présenté par la présidence en exercice du Conseil de l’UE, mais aussi par les États membres représentés par un administrateur, par la Commission européenne et par le président de la BCE, chacun étant censé intervenir en lien avec son domaine de compétence12. Lors de l'examen de la situation économique et financières de la zone euro (dit «consultation de l'article IV»), la déclaration introductive est présentée par le président élu parmi les directeurs de l'UE membres du conseil d'administration du FMI (ces directeurs formant un groupe informel, l'EURIMF). Pour la réalisation de cet examen, la délégation du FMI rencontre les représentants de la BCE, de la Commission, de l'Eurogroupe et du comité économique et financier13.

Au niveau du G7, le président de la BCE assiste à une partie des réunions ministérielles du G7, avec le président de l'Eurogroupe, et expose chacun en ce qui les concernent la position de l'UE. Le représentant de la Commission ne prend part au débat que de façon occasionnelle. Un schéma assez similaire est suivi dans le cadre du G20: le président du Conseil européen et le président de la Commission constituent la délégation de l'UE et exposent les positions de l'UE, la répartition de la prise de parole se faisant au cas par cas.

1Article 17 du traité UE.

2Article 138, paragraphe 2, du traité FUE.

3Conclusions du Conseil européen, Luxembourg, 12 et 13 décembre 1997, C/97/400, point 46.

4Commission, Proposition de décision du Conseil sur la représentation et la position de la Communauté au niveau international dans le domaine de l'Union économique et monétaire, Bruxelles, 9 novembre 1998, COM(1998) 637 final.

5Partsch, Philippe-Emmanuel, De quelques questions juridiques relatives au passage à la troisième phase de l’Union économique et monétaire et au fonctionnement de celle-ci, RTDE, janvier 1998, p. 73.

6CONV 470/02, CONTR 180, 22 décembre 2002, p. 5.

7Point A.2 de la recommandation du Conseil du 14 mai 2008 concernant les GOPE (2008-2010), Journal officiel n°L 137 du 27 mai 2008, p. 13.

9COM(2008) 238 final, 7 mai 2008, p. 13.

10Communication de la Commission, Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie. Lancer un débat européen, Bruxelles, 30 novembre 2012, COM(2012) 777 final/2;

11Deroose, Servaas, et Langedijk, Sven, Economic Policy coordination in EMU: accomplishments and challenges, dans Buti, Marco et Sapir, André, EMU and Economic Policy in Europe, Cheltenham: Edward Elgar, 2002, p. 224

12Voir par exemple lors de la réunion de printemps 2009 du CMFI. Sont intervenus en leur nom, les administrateurs du Royaume-Uni et de la France. Les administrateurs suédois, néerlandais, belge et italien sont également intervenus, mais au nom de la constituante qu’ils représentent. Notons que l’administrateur allemand ne présenta aucune déclaration.

13Aubrechtová Jana, Coussens, Wouter, Pineau, Georges, How to reconcile EU integration with the governance of the International Monetary Fund?, Národná Bank Slovenska, Banking Journal, janvier 2010, vol. 18, p. 6. Source: http://www.nbs.sk/_img/Documents/_PUBLIK_NBS_FSR/Biatec/Rok2010/biatec0110_EN.pdf, consultée le 15 octobre 2013.

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