Les organes subsidiaires de l'UEO

Les organes subsidiaires de l’Union de l’Europe occidentale


Les organes subsidiaires de l’Union de l’Europe occidentale (UEO) furent au nombre de neuf: l’Agence pour le contrôle des armements (ACA), le Comité permanent des armements (CPA), le Groupe armement de l’Europe occidentale (GAEO), l’Organisation de l'armement de l’Europe occidentale (OAEO), la Cellule de planification, l’État-major militaire de l’UEO, le Centre de situation, l’Institut d’études de sécurité et le Centre d’interprétation des données satellitaires.


L’Agence pour le contrôle des armements (ACA)


L’Agence pour le contrôle des armements a été créée en 1954 par le protocole n°IV du traité de Bruxelles. Établie à Paris, elle avait pour objet de veiller au respect des engagements pris par la République fédérale d’Allemagne (RFA) de ne pas fabriquer sur son territoire certaines catégories d’armements définis dans les annexes II et III du protocole n° III du traité de Bruxelles (NBC1 et certains armements classiques). Il s’agissait aussi d’assurer un contrôle général quantitatif des stocks d’armements pour tous les États membres sur le continent européen pour ce qui est des équipements définis à l’annexe IV du protocole n°III. L’ACA peut être considérée comme une mesure de confiance en même temps qu’une contribution à la stabilité de l’Europe occidentale au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle fut créée pour répondre à la préoccupation française et accessoirement anglaise de contrôler le réarmement allemand. Le protocole n°IV réglait les modalités de création de l’ACA, responsable devant le Conseil de l’UEO. L’Agence procédait soit par examen des documents fournis par l’Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) pour les forces et dépôts placés sous l’autorité de celle-ci, soit par enquête sur le terrain sous forme de sondage pour les autres forces, en respectant les intérêts économiques du secteur civil. Le protocole n°IV détaille aussi la manière dont les États procéderont afin de notifier leurs niveaux d’armement à l’Agence, ainsi que la procédure pouvant mener à une sanction(2). Occupant une place centrale dans le traité (tout comme l’article V d’assistance commune), l’ACA représenta jusqu’au milieu des années 1980 une part importante du budget, du personnel et de la place dans le rapport annuel sur les activités de l’UEO. Cependant, un ensemble d’éléments vidèrent en partie de sa substance cette politique de contrôle et de restriction: les amendements posés au contrôle, les recommandations du SACEUR(3) (OTAN) pour davantage de souplesse au vu des demandes allemandes, le caractère sensible des armements nucléaires, le retrait français du commandement intégré, la volonté des Européens et des Américains d’intégrer la RFA dans une logique de réconciliation et surtout de solidarité commune militaire et stratégique dans un environnement de Guerre froide. L’ACA comme outil de cohésion et de coopération fit son œuvre alors que les mesures pratiques de contrôle ne furent pas à la hauteur des engagements. Elle fut néanmoins un organe international indépendant disposant d’une expérience originale en matière d’échange de données et d’inspections aléatoires. Devenue anachronique dans une Europe des blocs où les alliés se devaient d’être «égaux», l’ACA fut supprimée(4) en avril 1985 lors de la réunion de Bonn après une réforme lancée dans le cadre de la déclaration de Rome du 27 octobre 1984.


Le Comité permanent des armements (CPA)


Le Comité permanent des armements fut un organe créé sur décision du Conseil du 7 mai 1955 en application de l’article VIII du traité. Non explicitement prévu par ledit traité (comme l’ACA), le CPA fut installé à Paris. Il était composé d’un faible nombre de fonctionnaires de l’UEO mais aussi de délégués permanents des États membres pouvant provenir des délégations auprès de l’OTAN. La mission du CPA fut de développer, en liaison étroite avec l’OTAN, les consultations et la coopération dans le domaine des armements en vue de rechercher des solutions communes qui faciliteraient aux gouvernements des pays membres la satisfaction de leurs besoins en matériels. Il s’agissait de parvenir à la conclusion d’accords ou arrangements, soit généraux entre tous les États membres, soit bi- ou multilatéraux entre certains d’entre eux, pouvant porter sur des problèmes tels que les études, la standardisation, la production et l’approvisionnement des armements. Relevons que ces accords étaient ouverts à la participation d’autres pays de l’Alliance. Le CPA faisait deux fois par an rapport sur ses activités au Conseil de l’UEO et assurait, via son secrétariat, la coopération avec FINABEL(5). Le CPA réalisa surtout des études dans le domaine de la recherche opérationnelle, de l’évaluation de matériels militaires et certaines expérimentations techniques. Aucun matériel proprement UEO ne fut élaboré dans ce cadre alors que l’OTAN, avec son Comité de production de défense, puis sa Conférence des directeurs nationaux des armements (CDNA) dominait ce secteur, tout comme le Groupe européen indépendant de programmes (GEIP). Le CPA permit néanmoins d’organiser la coopération entre fonctionnaires et militaires provenant de l’UEO, de l’OTAN et plus tard de l’Eurogroupe(6) et du GEIP. Dans la déclaration de Rome (1984), les ministres engagèrent la réorganisation du CPA qui verra en 1985 se décider la suppression de son secrétariat international au profit de la création de trois agences dont une, l’Agence n°III(7), qui devait impulser faiblement la coopération européenne en matière d’armement, vu le poids de la souveraineté nationale, l’effet double emploi et la concurrence d’organes plus importants qu’étaient le CDNA et le GEIP.


Le Groupe armement de l’Europe occidentale (GAEO)


Le GAEO fut créé en décembre 1992 avec activation l’année suivante. Il a regroupé 19 États membres(8) de l’UEO et avait pour objet plusieurs objectifs: l’ouverture des marchés nationaux de défense à la concurrence extérieure, le renforcement de la base technologique et industrielle de défense (BITD), la coopération en matière de recherche et de développement et enfin l’utilisation plus efficace des ressources par le biais d’une harmonisation accrue des besoins. Le GAEO, qui bénéficia de l’expérience du GEIP(9) dont il est en partie issu, était organisé autour des représentants des directeurs nationaux de l’armement (DNA) formant l’exécutif. Son secrétariat «armement» appuyait la présidence de l’UEO et se trouvait localisé dans les bâtiments du Secrétariat général. Trois commissions ont été organisées au sein du GAEO: coopération en matière de R&T(10), procédures et aspects économiques, programmes et besoins en matière d’équipements. Ces trois commissions avaient pour obligation de faire rapport aux DNA qui se réunissaient deux fois par an.

Le GAEO cessa ses activités le 23 mai 2005. L’Agence européenne de défense (AED) occupe le terrain au profit des États membres de l’Union européenne.


L’Organisation de l'armement de l’Europe occidentale (OAEO)


L’OAEO a été créée le 19 novembre 1996 lors du Conseil UEO d’Ostende avec un statut de personnalité juridique internationale. L’organisation, opérationnelle depuis le 7 mars 1997 et qui géra les activités R&T du GAEO est installé dans les bâtiments du Secrétariat général de l’UEO. Tous les pays du GAEO participèrent à cet organe subsidiaire à l’exception de l’Autriche. Elle fut ainsi chargée du soutien au GAEO en matière R&T et de la passation des contrats dans ce domaine au nom des États concernés. Plusieurs dizaines de projets ont été gérés par l’OAEO en utilisant plusieurs outils de promotion de la coopération: les mémorandums d’entente «Euclid», «Thales» et «Europa». L’OAEO était composée d’un comité de direction et d’une cellule recherche (organe exécutif) reposant sur une structure intergouvernementale dirigée par un directeur général. Le comité de direction comprenait un représentant de chaque pays (soit le DNA ou son délégué) et chaque décision était prise à l’unanimité, sauf exception lors de réunions biannuelles. Sa fonction principale fut de définir la politique générale de l’OAEO, les orientations de la cellule recherche, les choix financiers et la politique en matière de passation des contrats. L’OAEO cessa ses activités le 31 août 2006 pour les mêmes motifs qui présidèrent à la fin du GAEO avec un bilan positif s’agissant de la gestion des contrats.


La Cellule de planification, le Centre de situation et l’État-major militaire de l’UEO


La Cellule de planification de l’UEO a été mise en place le 1er octobre 1992 à Bruxelles et est devenue opérationnelle en mai 1993. Elle était associée à l’organisation plus opérationnelle de l’UEO inscrite dans la déclaration adoptée le 10 décembre 1991 à Maastricht par les États membres de l’UEO. Composée à l’époque d’une cinquantaine d’officiers des États membres et des États membres associés et pouvant être renforcée selon les besoins, cette cellule avait pour missions d’élaborer des plans génériques sur scénarios possibles d’opérations; établir et actualiser l’inventaire des forces susceptibles d’être engagées; préparer des plans d’exercices et rédiger à l’avance un inventaire des règles d’engagement. En cas de crise, la Cellule de planification pouvait être engagée pour fournir avis, recommandations et documents de circonstances sur instruction du Conseil. Cette Cellule de planification fut précurseur de l’État-major militaire de l’UEO dont la naissance fut décidée lors du Conseil des ministres d’Erfurt en novembre 1997 pour une mise en place permanente en mai 1998. L’État-major militaire de l’UEO, structure permanente avec un directeur officier trois étoiles, avait pour mission la mise en œuvre des orientations et décisions définies par le Conseil avec l’aide du Comité militaire (non permanent). Cet État-major assistait aussi les groupes de travail de l’UEO au cours du processus d’information et de décision et donnait des directives et orientations au chef de l’Élément de soutien de l’État-major, au directeur de la Cellule de planification et au chef du Centre de situation. Ce dernier organe, opérationnel dès juin 1996, avait pour fonction la surveillance des zones de crise (indiquées par le Conseil) et le suivi du déroulement des missions de l’UEO. Ces différentes structures d’orientation militaire furent dissoutes au cours du processus de dessaisissement de l’UEO autour du sommet de Marseille de novembre 2000. L’État-major de l’UEO verra ses effectifs d’abord réduits de 35% conformément au plan de transition approuvé le 17 octobre 2000 par les chefs d’État-major des armées, avant de disparaître au profit de l’État-major de l’Union européenne (UE) opérationnel le 11 juin 2001, à l’issue de l’exercice conjoint théorique JES-2001 UEO-OTAN (Joint Exercise Study 2001) réalisé aux Pays-Bas. Cependant, la déclaration de Marseille suspendit, en dehors des nécessités relatives audit exercice, tous les mécanismes de consultation de routine entre l’UEO et l’OTAN (comme ceux entre l’UEO et l’UE, sans préjudice cependant de la coopération requise dans le cadre du processus de transition)


L’Institut d’études de sécurité (IES)


L’IES de l‘UEO fut crée sur décision ministérielle du Conseil du 13 novembre 1989. Installé à Paris au 3ème étage du bâtiment qui accueille les bureaux de l’Assemblée de l’UEO, cet institut ouvrit ses portes le 1er juillet 1990. L’objectif de l’IES était de promouvoir l’identité de sécurité et de défense en contribuant au débat général sur les questions qui s’y rattachent. Il avait aussi pour mission d’informer le Conseil de l’UEO sous la forme d’analyses et de rapports de recherche à confidentialité variable. Il fut enfin amené à créer des synergies entre des instituts de recherche stratégique provenant des différents États membres, mais aussi d’instituts localisés ailleurs. L’institut organisa à cet effet colloques, séminaires, conférences et entretiens rassemblant des acteurs institutionnels, académiques, industriels, médiatiques et militaires. Il édita plusieurs publications occasionnelles ainsi que des monographies dans la collection Cahiers de Chaillot. L’institut était composé d’un directeur, de chargés de recherche à durée déterminée provenant des États membres de plein droit et de chercheurs boursiers temporaires. Vu les décisions prises au sommet de Marseille (novembre 2000), l’IES de l’UEO fut placé sous l’égide de l’Union européenne au 1er janvier 2002 en tant qu’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne.


Le Centre d’interprétation des données satellitaires


Le Centre satellitaire de l’UEO a été créé suite à la décision du Conseil de Vianden du 27 juin 1991 pour être inauguré le 28 avril 1993 dans la banlieue de Madrid, à Torrejón de Ardoz. Son opérationnalité fut effective le 13 mai 1997. Le Centre comprenait un directeur, un comité directeur composé d’un représentant de chaque État membre et du personnel avoisinant une quarantaine d’agents. Le Centre, placé sous l’autorité du Conseil, avait pour mission d’interpréter les images satellitaires disponibles sur le marché privé (Européens, Américains, Canadiens, Indiens, Russes) ou pouvant être transférées par des satellites militaires nationaux comme le système Hélios. Les images interprétées par les experts à Torrejón étaient d’origine optique, infrarouge ou radar. La lecture de ces images fut un outil d’aide à la décision pour le Conseil de l’UEO dans les phases préventives, les phases de crise ou les phases post-conflit. Il fut également un apport pour la vérification des accords de maîtrise des armements et la surveillance des risques pour l’environnement. Le Centre satellitaire put également mettre à disposition du Conseil de l’UEO mais aussi de l’UE, de l’OTAN et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) son système d’information géographique (SIG11) sur le Kosovo.


Le contrôle politique du Centre était assuré par deux mécanismes: réception des ordres de travail par l’intermédiaire de la cellule nationale concernée et soumission au Conseil permanent de l’UEO de tous les ordres de travail émanant de l’UEO ou des États membres ou membres associés. Vu le caractère sensible des données et les priorités nationales, le Conseil de l’UEO ne put utiliser l’outil de manière optimale au vu de certaines procédures en termes de consensus et de délais (satellite Hélios).


Suite au sommet UEO de Marseille en novembre 2000, le Centre satellitaire fut placé sous l’égide de l’Union européenne au 1er janvier 2002 en tant que Centre satellitaire de l’Union européenne.


(décembre 2009)



(1) nucléaire, biologique et chimique

(2) À ce titre, le Conseil statue à la majorité.

(3) Commandant suprême des forces alliées en Europe

(4) En réalité, l’ACA subsista pour respecter la lettre du traité mais avec des compétences fortement diminuées. Elle fut placée sous la même direction administrative qu’une nouvelle agence (Agence I consacrée aux questions de contrôle des armements et du désarmement); les deux autres agences nouvelles s’occ upaient des questions de sécurité et de défense (Agence II) et de coopération européenne en matière d’armement (Agence III). Ces trois agences furent établies à Paris et avaient pour mission d’aider le Conseil en étant rattachées au Secrétariat général.

(5) Finabel est un organisme de coordination des états-majors des forces terrestres de certains pays membres de l’UEO.

(6) L'Eurogroupe a rassemblé des gouvernements européens dans le cadre de l'OTAN de 1968 à 1993. Sa mission était la coordination des politiques des pays européens en vue d’une certaine standardisation des matériels militaires. À la suite de la décision prise le 24 mai 1993 par les ministres de la Défense participant à l'Eurogroupe, les activités de celui-ci en matière d'entraînement dans le domaine médical (EUROMED) ont été transférées à l'OTAN, et ses fonctions en matière d'information et de télécommunications (EUROCOM) ont été transférées à l'UEO. L'Eurogroupe proprement dit a été dissous le 1 er janvier 1994.

(7) L’Agence n°III fut définitivement supprimée en 1989

(8) Aux États membres de plein droit sont venus s’ajouter selon des modalités spécifiques des pays observateurs et des pays associés partenaires (décision du Conseil UEO d’Erfurt en novembre 1997).

(9) Les ministres de la Défense des 13 États membres du GEIP créé en 1976 décidèrent le 4 décembre 1992 de transférer leur organisation à l’UEO, donnant alors naissance au GAEO comme organisme successeur. En 1993, ce fut au tour de l’Eurogroupe de transférer ses activités en matière de logistique et de concepts d’équipements futurs.

(10) Recherche et technologie

(11) Système informatisé de saisie, stockage, vérification, gestion, analyse et affichage de données à référence spatiale, destiné à produire des informations cartographiques et connexes.

Consult in PDF format