Les positions communes

Les positions communes

La nécessité de positions communes

La question de la définition de positions communes se révèle délicate en raison de l'éclatement des compétences entre l'UE et les États membres et les différents statuts monétaires des États membres. La dimension économique, financière de l'UE et de ses États, la dimension internationale de sa monnaie créée une responsabilité particulière de l'UE dans le bon fonctionnement du système monétaire international et de la gouvernance économique mondiale1. La défense des intérêts et des valeurs communs s'en trouve mieux assurée si l'UE parle d'une unique voix. «La coopération au niveau international est un outil permettant de mieux internaliser les effets externes [des] décisions économiques et financières [des partenaires] et de limiter les risques que ces politiques et des évolutions nationales non soutenables aient des retombées négatives.»2 À l'époque où s'engagent les réflexions sur la représentation extérieure de l'UE, l'exigence de positions communes européennes est illustrée par l'incapacité des Européens à s'exprimer d'une voix unique sur la crise financière asiatique (1997), sur la crise financière et économique russe (1998) et sur la réforme des institutions financières internationales.

Le traité prévoit s'agissant des États membres de la zone euro que le Conseil, sur proposition de la Commission, adopte une décision établissant les positions communes concernant les questions qui revêtent un intérêt particulier pour l'UEM au sein des institutions et conférences financières internationales. Compte tenu des éventuelles liaisons avec la politique monétaire, le Conseil statue après consultation de la BCE. Le Conseil européen de Vienne de décembre 1998 envisage aussi les questions qui ne relèvent pas de la compétence de l'UE mais pour lesquelles il peut être appropriée que les États membres de la zone euro formulent des conceptions communes: les États sont invités à parvenir à des solutions pragmatiques.

Le Conseil européen de Vienne de décembre 1998 préconise une certaine cohérence mais reste vague quant aux modalités précises par lesquelles des positions uniques sont formulées:

«Par souci de cohérence et d’efficacité, la Communauté doit être capable de s’exprimer d’une seule voix sur les questions qui revêtent une importance particulière pour l’Union économique et monétaire. Le Conseil européen encourage la Commission, le Conseil et les États membres à faire le nécessaire pour que des positions communes et des points de vue communs puissent être définis de manière efficace et en temps opportun pour être présentés dans les enceintes internationales.» 3

La préparation des positions communes

En pratique, un processus informel est mis en place au niveau communautaire. La coordination des positions européennes au sein du FMI sont préparées dans un sous-comité sur les questions liées au FMI créé au sein du CEF en 20014, le sous-comité pour le FMI (ou SCIMF). Sa composition reproduit celle du CEF, à savoir deux représentants par État membre, indifféremment de leur statut vis-à-vis de l’euro, ainsi que de deux représentants de la BCE et de la Commission sans droit de vote. Le SCIMF est présidé par un fonctionnaire national choisi par consensus par ses pairs parmi les hauts fonctionnaires de ce sous-comité. La règle de vote est en théorie celle de la majorité simple, même si en pratique la configuration intergouvernementale de cette structure conduit à préférer la recherche du consensus parmi les membres. Il se réunit une dizaine de fois par an, ce qui ne lui permet pas de suivre l’activité du conseil d’administration au jour le jour. Le SCIMF se concentre par conséquent sur un nombre de sujets limités, dont la préparation du discours présentés par le président de l’Union lors des réunions annuelles du FMI ou du comité monétaire et financier international. Par ailleurs, à Washington, les représentants des États membres de l’Union ont constitué depuis 2000 un groupe informel, l’EURIMF, afin d’améliorer l’efficacité de leur coordination5. La Commission, ainsi que la BCE, qui dispose d’un représentant permanent à Washington, participent à ce groupe. Les sujets stratégiques relatifs à la zone euro sont évoqués et non la situation individuelle des États membres. De façon générale, les points soumis à l’ordre du jour du conseil d’administration du Fondsdonnent lieu à un échange de vue et le cas échéant à une coordination des positions. Depuis 2007, l’EURIMF a structuré ses travaux, la fonction de président ayant été créée. Elle est assurée par le représentant de l’Allemagne au conseil d’administration du FMI (Klaus Stein). Il est à noter que cette présidence se surajoute à celle de l’Eurogroupe. Par ailleurs, en vue de garantir l’efficacité de ces réunions à la suite de l’élargissement de l’UE de 2004, sont organisées des réunions ad hoc (les «mini-EURIFM») entre les représentants des seuls États membres disposant d’un administrateur nommé ou élu au conseil d’administration.

Le degré de coordination entre les représentants européens constaté en pratique se révèle dépendant de la nature des sujets discutés au FMI. Plus ceux-ci concernent des matières transférées au niveau communautaire (politique monétaire, politique de change), plus la coordination est recherchée, notamment en matière de politique de change. À l’inverse, plus les sujets s’éloignent des domaines de compétences exclusives de la Communauté, plus les divergences entre États membres se font jour et la coordination, faible (par exemple l’assistance financière du FMI aux pays africains). Sur le fond, dans la mesure où l’EURIMF demeure une structure informelle et ne modifie pas le mandat des administrateurs, il n’y a aucune obligation pour les membres de l’EURIFM d’aboutir une position unique et le plus souvent les réunions se limitent à des échanges de vue.6


La coordination des positions européennes à défendre dans le cadre de la Banque mondiale est moins élaborée que ce qui est pratiqué au niveau du FMI. De 2000 à 2003, des réunions officieuses entre administrateurs et administrateurs européens suppléants se tenaient de façon plus ou moins régulière. Un gentleman agreement a été adopté en novembre 2003 prévoyant que les représentants des États membres se réunissent une fois toutes les deux semaines, fréquence ramenée à une réunion par semaine à l’automne suivant7. Le représentant de la Commission à Washington assiste à ces réunions. Ces dernières, outre les échanges de points de vue, permettent de coordonner les déclarations voire d’élaborer des positions communes (à la différence du FMI). Les déclarations communes (joint statements) que la présidence de l’UE présente lors des réunions du conseil des administrateurs de la Banque mondiale, sont en général soumises à la discussion lors de ces réunions. Elles ne seront présentées qu’au nom des pays y souscrivant. Aucune structure équivalente au SCIMF n’a été mise en place à Bruxelles pour favoriser cette coordination.


Au niveau des réunions G 7 ou du G 20, les positions communes sont préparées par le CEF et discutées par le Conseil Ecofin. Ces positions s'appuient le cas échéant sur les éléments de langage approuvés par les chefs d'État ou de gouvernement, ainsi que cela est le cas pour la préparation du sommet du G20 de Pittsburgh de septembre 2009. La position commune est transmise par la présidence en exercice du Conseil aux partenaires étrangers participant au G20. Les mesures convenues au G20 font ensuite l'objet d'un suivi par la Commission et de discussions au sein du Conseil.

Du côté de la BCE, les positions adoptées dans le champ de ses compétences sur la scène internationale sont préparées au sein du comité des relations internationales.



1Commission, Document de travail des services de la Commission. Les aspects externes de l'Union économique et monétaire, Bruxelles, 23 avril 1997, SEC(97) 803.

2Banque centrale européenne, La représentation externe de la l'UE et de l'UEM, Bulletin mensuel de la BCE, mai 2011, p. 87.

3Conclusions du Conseil européen de Vienne, 11 et 12 décembre 1998, point 14.

4De 2001 à 2003, ce sous-comité consistait en réalité un groupe de travail sur la FMI au sein du CEF.

5Ce groupe réunit également les administrateurs suppléants ou les conseillers rattachés aux représentations des États membres auprès du FMI.

6ADS Insight, Europe Coordination at the World Bank and in the International Monetary Fund. A Question of Harmony ? Étude réalisée pour le compte de l’ONG Eurodad, Bruxelles, janvier 2006, p. 4 ; Bini-Smaghi L., « A Single EU Seat at the IMF », JCMS, vol. 42, n°2, juin 2004, p. 236.

7ADS Insight, Europe Coordination at the World Bank and in the International Monetary Fund. A Question of Harmony ? Étude réalisée pour le compte de l’ONG Eurodad, Bruxelles, janvier 2006, p. 13.

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