L’Europe unie des socialistes et le Mouvement socialiste pour les États-Unis d'Europe (MSEUE)

L'Europe unie des socialistes et le Mouvement socialiste pour les États-Unis d'Europe (MSEUE)



Dès la Libération, les socialistes réactualisent les projets pour une Europe unie que beaucoup d'entre eux ont défendus dans la clandestinité ou même déjà en 1930 dans le sillage d'Aristide Briand et de son fameux plan d'union fédérale européenne. Mais les socialistes ne peuvent accepter que l'idée européenne se réduise à la restauration d'un occident médiéval chrétien. C'est ainsi qu'ils dénoncent le spectre d'une «Europe vaticane», c'est-à-dire d'un complot ourdi par le Saint-Siège avec la complicité des partis démocrates-chrétiens européens en vue de restaurer les fondements d'une Europe chrétienne sur le modèle du Saint-Empire romain-germanique médiéval. Ils sont par contre d'avis que seul le socialisme démocratique offre une alternative au capitalisme débridé et au communisme totalitaire afin de résoudre les immenses difficultés liées à la reconstruction économique, en suivant les principes de justice, de droit, de liberté et de dignité humaine. À leurs yeux, l'Europe unie offre en effet l'avantage de freiner efficacement l'expansion du fascisme et du communisme tout en assurant une paix durable en interposant une troisième force internationale crédible entre les États-Unis et l'URSS. Certains socialistes prônent une Europe unie socialiste qu'ils opposent à une Europe des intérêts du capitalisme privé sous influence américaine. D'autres sont plutôt d'avis qu'il faut travailler ensemble avec les différents courants d'idées fédéralistes et démocratiques.



Le Mouvement pour les États-Unis socialistes d'Europe, présidé par André Philip, est né à Montrouge, près de Paris, en juin 1946 de la volonté de créer une Europe socialiste indépendante des États-Unis et de l'URSS. Il s'efforce de renouer avec l'ancienne tradition internationaliste des partis socialistes et son objectif initial est de parvenir à une planification socialiste d'une Europe unie. Mais après le début de la Guerre froide, cette attitude doctrinaire va peu à peu faire place à une approche plus coopérative qui conduit le mouvement à se consacrer davantage à la construction européenne. Celui-ci change d'ailleurs de dénomination en 1947 pour devenir le «Mouvement socialiste pour les États-Unis d'Europe» (MSEUE) qui estime urgent de faire d'abord l'Europe avant de lutter pour qu'elle soit socialiste.



Ses animateurs vantent l'unification européenne mais ils ne peuvent concevoir l'Europe unie sans la présence allemande et sans la participation de la Grande-Bretagne et des pays scandinaves, notamment parce qu'ils estiment ces pays davantage imprégnés de l'esprit socialiste que les Six de la «petite Europe». Sur le plan économique, le MSEUE réclame la planification des industries de base en Europe et celle des investissements en vue de permettre aux pays sous-développés d'Europe et d'outre-mer d'accéder au progrès économique.



Dans le contexte de la Guerre froide qui s'intensifie chaque jour un peu plus, la majorité des socialistes viennent à soutenir activement le plan Marshall d'assistance à l'Europe occidentale en 1947. L'installation de dictatures communistes en Europe orientale conduit finalement de nombreux socialistes à se distancer des positions doctrinaires et à militer pour une construction européenne ancrée dans l'alliance occidentale, même s'ils restent souvent divisés sur la méthode à suivre et sur le degré de souveraineté qu'ils sont prêts à concéder.




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