Pierre Werner et la construction européenne dans les années 1960-1969

Pierre Werner et la construction européenne dans les années 1960-1969


Sensibilisé aux enjeux européens depuis ses études universitaires1, l’engagement de Pierre Werner en faveur de l’unification européenne se cristallise dès 1949, quand il devient convaincu «de la nécessité impérieuse pour les pays de l’Europe occidentale d’entreprendre la construction économique et politique de l’Europe unie. L’expérience de son travail international, notamment la prise de conscience de la faiblesse et de la division de l’Europe, en faisaient presque une obligation intellectuelle»2.


Associé de plus en plus étroitement, par ses fonctions au sein du gouvernement luxembourgeois, aux grands dossiers de la construction européenne, Pierre Werner, qui sera amené à agir en Luxembourgeois et Européen à la fois, laissera son empreinte sur des événements charnières de cette édification. La «bataille des sièges» de 1965, la consécration du Luxembourg comme l’une des capitales permanentes des institutions communautaires3, le «compromis du Luxembourg» de 1966, le rapport Werner de 1970 traçant les contours de l’union économique et monétaire comptent parmi les aboutissements auxquels sa contribution est essentielle4.

1Après le cours supérieur préparatoire en droit (1934-1935) à Luxembourg, Pierre Werner part à Paris pour suivre les cours dispensés par la Faculté de Droit (1935-1937) tout en fréquentant les cours de l'École libre des Sciences politiques. C’est dans ce contexte qu’il intègre les milieux européens de réflexion catholiques et établit des contacts fructueux avec bon nombre de personnalités, parmi lesquelles ses professeurs Jacques Rueff, Charles Rist, Wilfried Baumgartner, Fernand Collin, qui ont beaucoup influencé sa formation intellectuelle et ont stimulé son intérêt pour l’étude des phénomènes monétaires. À Paris, il rencontre également Robert Schuman qu’il a été amené à côtoyer par la suite, au début des années 1950, lors de l’installation à Luxembourg de la Haute Autorité de la CECA.

2Pierre Werner, Itinéraires luxembourgeois et européens. Evolutions et Souvenirs: 1945-1985, 2 tomes, Éditions Saint-Paul, Luxembourg, 1992, tome 1, p. 35.

3Dès son entrée au gouvernement comme ministre des Finances, Pierre Werner se penche sur les grands projets de reconstruction et de développement du pays (génie civil, infrastructure, aménagement du territoire) qui mobilisent des ressources considérables. C’est dans la perspective de faire du Luxembourg un pays moderne tourné vers l’avenir et une véritable plate-forme internationale, que le grand programme d’urbanisation et d’aménagement du plateau de Kirchberg démarre en 1961. Précisément, ce «quartier européen» de Luxembourg est aménagé pour constituer un atout majeur du pays dans la bataille des sièges.

4Sur le plan intérieur, Pierre Werner a joué un rôle majeur dans la diversification économique du pays: la promotion du Luxembourg au rang de place financière internationale, l’idée d’un pavillon maritime luxembourgeois, le projet des satellites, font partie de ses initiatives visionnaires. La politique culturelle que Pierre Werner a menée en tant que ministre des Affaires culturelles (1979-1984) a beaucoup contribué à ce que le Luxembourg renforce son spécifique et consolide son identité nationale par une large ouverture internationale. Il a été également mentor et inspirateur pour d’autres personnalités luxembourgeoises, qui ont suivi ses actions aussi bien sur le plan national qu’européen.

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